En décembre 2022, SOS Faim a souscrit à des parts dans la coopérative citoyenne Gringgo pour un montant de 5.000€. En effet, SOS Faim, à travers son programme « Idéal » (Investir dans le DEveloppement d’Alternatives au Luxembourg), investit directement, sur fonds propres, dans le capital de coopératives citoyennes et actrices de changement. L’ONG devient ainsi acteur de changement, sur son propre territoire.
Basée selon le modèle allemand d’une « Regionalwert AG »,
Gringgo est une coopérative citoyenne qui permet aux citoyens et aux
investisseurs de prendre part dans des projets durables d’entreprises
régionales dans des secteurs économiques divers comme l’agriculture et
l’alimentation, la construction, le textile ou encore le tourisme.
Ainsi, Gringgo stimule le développement d’un réseau régional
durable entre les producteurs, les commerçants et les consommateurs.
Claude Haagen, ministre de l’Agriculture, de la Viticulture
et du Développement rural, et Joëlle Welfring, ministre de l’Environnement, du
Climat et du Développement durable ont salué le dynamisme et le caractère
innovant de Gringgo − Regionalwert Lëtzebuerg.
Selon la méthodologie établie par le Global Footprint
Network, le Luxembourg aura épuisé le 14 février prochain, toutes les
ressources à sa disposition pour l’année 2023. C’était le 15 février en 2021.
Comment le Luxembourg et ses habitants vivront-ils donc les 320 jours restants ?
Devront-ils
et devrons-nous nous serrer la ceinture sur notre alimentation, notre
chauffage, l’utilisation de nos écrans et nos voitures, nos loisirs et nos voyages ?
Apparemment non. Comme l’indique l’avancée de la date d’un jour supplémentaire
en seulement deux ans, les habitants du Luxembourg continueront selon leurs
habitudes qui les conduisent à émettre entre 15,5 et 20 tonnes de CO2 annuelles
(suivant l’origine nationales ou internationales des statistiques).
« Si l’on doit trouver un coupable à
notre empreinte si élevée, c’est notre pouvoir d’achat, pointe Thomas
Gibon, chercheur au List (Luxembourg
Institute of Science and Technology). La
corrélation entre niveau de vie et empreinte carbone a été prouvée maintes et
maintes fois : de fait, plus on est riche, plus on a une grande maison, un
grand nombre de voitures (et d’appareils digitaux), une alimentation carbonée,
plus on achète de produits de consommation, de voyages en avion, de meubles, de
vêtements ou d’articles de sport. »
Et
comment nous tous, consommateurs d’un pays particulièrement riche (où le PIB/
habitant est parmi le plus élevé du monde), faisons-nous pour dépenser des
ressources naturelles qui ne sont plus disponibles sur le territoire
national ? Nous les prélevons ailleurs, principalement dans les pays à
faible revenus, confisquant ainsi aux plus pauvres des ressources dont la perte
peut leur être fatale : « les
10 % les plus riches sont responsables de la moitié (48 %) des émissions
mondiales de CO2. Le 1 % le plus nanti entraîne même à lui seul17 %
des rejets carbonés, soit davantage que la moitié la plus pauvre de la
population, qui est responsable de 12 % des émissions. Ce top 1 % est
responsable d’un quart de la croissance des émissions entre 1990 et 2019 »
explique une étude
sur les inégalités climatiques publiée le 31 janvier et coordonnée par Lucas Chancel avec Thomas
Piketty. Selon ces économistes réunis par le Laboratoire sur les inégalités
mondiales (World Inequality Lab), un institut de recherche rattaché à l’Ecole
d’économie de Paris et à l’université de Californie à Berkeley, « revoir
la fiscalité mondiale, notamment en taxant les plus riches, permettrait à la
fois d’accélérer la lutte contre le réchauffement et celle contre la
pauvreté. »
Lorsque
la moitié la plus pauvre émet seulement 1,4 tonne d’équivalent CO2 par
personne et par an, le 1 % de la population mondiale la plus privilégié
émet 101 tonnes (le top 10 %, en émet 29 tonnes, contre
6 tonnes pour les classes intermédiaires), selon les chiffres avancés par
Lucas Chancel, qui prennent en compte à la fois la consommation de biens et
services et les investissements. Or, pour conserver une chance de limiter le
réchauffement climatique à 1,5 °C à la fin du siècle, il faudrait réduire
l’empreinte carbone à 1,9 tonne par personne en 2050.
Dans le
même temps, « la moitié la plus pauvre de la population mondiale endure 75 %
des pertes de revenus liées aux impacts du changement climatique (inondations,
sécheresses, glissements de terrains, ouragans…, NDLR), tout en ayant le moins
la capacité financière pour agir (faibles infrastructures publiques, pas
d’accès aux assurances… NDLR),: seulement 3 % des capacités de financement alors
que les trois quarts sont concentrées dans les mains des 10 % les plus aisés ».
Face à
ces données et ces faits, nous ne pouvons plus tergiverser sur la question de
notre redevabilité, ni de la responsabilité des pouvoirs publics d’un pays dont
les piliers de prospérité reposent sur un pouvoir d’achat globalement très
élevé (malgré l’émergence de personnes précaires de plus en plus nombreuses),
levier d’une consommation destructrice de la biodiversité et prédatrice des
ressources des plus vulnérables.
C’est bien le sens de l’appel lancé par le
Conseil supérieur pour un développement durable et
rallié par SOS Faim : « Dans le moment crucial que représente cette année
d’élections, le Conseil lance un appel solennel à toute la société
luxembourgeoise à faire pression sur la politique, et aux partis à prendre
leurs responsabilités pour pallier l’urgence climatique, environnementale et
sociétale. Il est impératif que la politique prenne enfin – à la
hauteur des enjeux climatiques, de biodiversité et d’inclusion sociétale – la
mesure des changements qui s’opèrent et mette en œuvre concrètement les
instruments pour relever ces défis. »
Car, conclut le rapport du Laboratoire
sur les inégalités mondiales, « Réduire l’empreinte carbone du sommet permettrait ainsi de
libérer un budget carbonepour sortir les gens de la pauvreté ».
Ce lundi 30 janvier, la Commune de Schifflange et Schëffleng Hëlleft ont invité SOS Faim et LUkraine Asbl. à une remise de chèque. SOS Faim remercie chaleureusement la Commune et son Bourgmestre, Monsieur Paul Weimerskirch, pour ce geste généreux.
La commune s’est engagée à soutenir SOS Faim avec un subside de 20.000€ : 10.000€ en 2022 et 10.000€ en 2023. Le don à hauteur de 10.000€ nous permet d’agir auprès des producteurs d’Afrique dans un contexte mondial très difficile avec une multitude de crises qui affectent plus durement, comme souvent, les plus vulnérables.
Les personnes les plus touchées par la faim sont les enfants, les femmes et plus particulièrement les paysans et leurs familles. Ces familles n’ont pas accès à une alimentation suffisante car elles n’ont pas accès au principales ressources nécessaires à la survie dont notamment : l’eau, des terres cultivables, l’éducation et la santé.
Merci à la Commune de Schifflange de nous soutenir dans le cadre de notre partenariat avec la FUCOPRI, un acteur qui développe des filières locales et durables.
Effectivement, il est aujourd’hui plus que jamais important d’encourager la production alimentaire locale. Au Niger, notre partenaire, la FUCOPRI, promeut la production locale de riz, qui permet non seulement de réduire la dépendance au blé ukrainien et russe, mais aussi aux importations de riz d’Asie. Produire localement et favoriser les échanges de produits agricoles et alimentaires sous-régionaux constituent une piste importante pour la souveraineté alimentaire ouest africaine et la création d’emplois.
Nous espérons que ce partenariat se poursuivra dans les années à venir. Comme les bureaux de SOS Faim sont implantés au cœur de Schifflange, nous sommes particulièrement reconnaissant de la confiance que la ville accorde à notre travail, ici au Luxembourg et dans les sept pays d’Afrique où nous sommes présents.
Quand : Lundi, 20 février 2023 à 20h00 Où : Centre Culturel et de Rencontre Neimënster (Salle «Robert Krieps») Adresse : 28, rue Münster, Luxembourg Inscription : meco@oeko.lu
De quoi s’agit-il ?
50 ans après « Les limites de la croissance », rapport qui a façonné les discussions sur le développement durable comme pratiquement aucun autre document, des scientifiques renommé·es du Club de Rome se tournent à nouveau vers l‘avenir et présentent un plan de redressement pour notre monde en crise.
Le conférencier
Jørgen Randers est professeur émérite de stratégie climatique à la BI Norwegian Business School. Il est membre à part entière du club de Rome et président fondateur de l’association chinoise du club de Rome.
Conférence
Langue : En anglais – Traduction simultanée en français. Les participant·es auront la possibilité de s‘impliquer dans les discussions. Après la conférence, nous vous invitons cordialement à un verre d’amitié.
Avant la Journée mondiale sans
pesticides du 3 décembre, plus de 326 organisations de la société civile
du monde entier, des institutions et des syndicats, ont publié une déclaration
commune exigeant l’interdiction de l’exportation de produits chimiques
dangereux interdits dans l’UE. Ils exhortent la Commission européenne à ne pas
reporter la proposition législative promise pour y parvenir.
Rien qu’en 2018, plus de 81 000 tonnes de pesticides contenant 41 produits chimiques dangereux interdits à l’agriculture dans l’UE ont été exportés par des sociétés européennes.
En plus de la déclaration commune signée par SOS Faim parmi 326 ONG et syndicats publiée le 1er décembre, une pétition d’interdiction d’exportation a été remise au commissaire à l’environnement Sinkevičius et signée par plus de 200 000 citoyens du monde entier.
Dans le cadre de la stratégie sur
les produits chimiques de l’Accord vert de l’UE pour un environnement sans
toxicité en 2020, la Commission européenne s’est engagée à « donner
l’exemple et, conformément aux engagements internationaux, à veiller à ce que
les produits chimiques dangereux interdits dans l’Union européenne ne soient
pas produits pour l’exportation, notamment en modifiant la législation
pertinente au besoin. » Toutefois, le programme de travail 2023 de la
Commission européenne ne prévoit pas d’action juridique très nécessaire pour
mettre fin à cette pratique.
Un porte-parole de la coalition
de la société civile a déclaré:
« L’UE devrait agir rapidement. Les pays à revenu faible et intermédiaire comme le Maroc, l’Afrique du Sud, l’Inde, le Mexique, la Malaisie ou le Brésil sont inondés de pesticides dangereux interdits dans l’UE, qui ne peuvent pas être utilisés en toute sécurité et qui ont des effets dévastateurs sur la santé humaine et l’environnement, ce qui entraîne une violation généralisée des droits de la personne. En outre, ces pays sont parmi les plus grands exportateurs de produits agroalimentaires vers l’UE et les pesticides interdits pourraient donc se retrouver dans les assiettes des citoyens européens. »
Chaque année 44 % des travailleurs agricoles dans le monde sont confrontés à des intoxications aiguës dues aux pesticides, la majorité des incidents et la plupart des décès liés aux pesticides se produisent dans les pays du Sud. Dans le cadre du Green Deal, la Commission européenne s’est engagée à réduire de 50 % l’utilisation et les risques liés aux pesticides dans l’UE d’ici à 2030, et à mettre fin aux doubles standards en matière d’exportation de pesticides. Or, cette proposition attendue pour le début de l’année 2023, a maintenant disparu du programme de travail de la Commission, ce qui n’est pas improbable en raison de la forte pression du lobby de l’industrie de l’agrochimie. Alors qu’en même temps, dans l’Union européenne, 1,2 millions de citoyen/nes ont soutenu l’initiative citoyenne européenne « Save Bees and Farmers », en demandant l’élimination progressive de tous les pesticides de synthèse d’ici à 2035, la restauration de la biodiversité dans les zones agricoles et une transition vers l’agroécologie. Au Luxembourg, 5.293 de personnes ont signé cette initiative. Le signal démocratique est donc très clair et provient de tous les États membres de l’UE.
Malgré cela, l’Organisation des Nations unies pour
l’alimentation et l’agriculture (FAO) a conclu un partenariat avec CropLife
International, l’organisation parapluie qui chapeaute les plus grandes
entreprises produisant des pesticides, cherchant à trouver de nouveaux marchés
et renforcer leur présence sur les marchés des pays du Sud pour continuer leur
vente de pesticides toxiques, pour la plupart interdits dans l’UE. Un
partenariat qui va donc à l’encontre des ambitions que la FAO se donne et qui
vise une réduction de la dépendance aux pesticides en faveur de la production
agricole durable et à encourager des approches moins dangereuses et
alternatives aux pesticides chimiques de synthèse.
Le
Luxembourg est un important contributeur volontaire à la FAO. Il est donc de
son devoir de s’assurer que son argent n’est pas utilisé au soutien d’un
partenariatentre
le plus grand acteur des pesticides et les organisations des Nations Unies.
Cette collaboration n’est pas acceptable sur le plan social, environnemental et
politique.
C’est pour cela que le Mouvement Ecologique, SOS Faim, natur&ëmwelt asbl, Greenpeace Lëtzebuerg et « Pesticide Action Network » ont adressé une lettre au Ministre de la Coopération et de l’Action humanitaire, Franz Fayot, pour savoir quelles mesures ont été prises par le Luxembourg afin que la FAO annule son partenariat avec CropLife ainsi que si le Luxembourg considère l’idée de conditionner le financement de la FAO à la rupture immédiate de sa collaboration avec CropLife International.
Vous pouvez télécharger la lettre envoyée au Ministre ici :
Du 24 au 31 octobre
dernier, notre Responsable des Partenariats pour le Niger était en mission à
Niamey. L’occasion pour nous de vous proposer une immersion dans son travail de
terrain.
« Durant quelques jours, malgré des difficultés de déplacement hors de la capitale pour raisons sécuritaires, j’ai pu me rendre en différents lieux pour constater et mieux comprendre les activités de nos partenaires, dont voici quelques moments marquants » .
La Fédération des Coopératives Maraîchères du Niger (FCMN Niya), m’a conduit à Saga, en périphérie de la capitale pour y rencontrer un groupement de femmes transformatrices de produits maraîchers, accompagnées techniquement par la fédération. Cet échange fut l’occasion d’en apprendre davantage sur leur fonctionnement, leur évolution, leur organisation, les modalités d’accompagnement de la FCMN Niya, leurs difficultés actuelles et les solutions qu’elles inventent pour les surmonter.
La Fédération des Unions et Coopératives des Producteurs de Riz (FUCOPRI) a souhaité m’emmener sur le site d’une ferme semencière membre de la fédération, qui cherche à produire et étudier différents types de compost. En réponse à la récente inflation touchant les engrais et limitant la capacité des producteurs à en acquérir, l’organisation souhaite en faire la promotion auprès des riziculteurs. En plein démarrage des récoltes, j’ai pu visiter des parcelles rizicoles pour comprendre les étapes et procédés permettant le ramassage et la préparation du riz, notamment le battage, réalisé généralement à la main par des groupes de femmes en frappant les épis contre des tonneaux, et le vannage[1].
La coopérative FASAM œuvrant dans le développement et la promotion d’intrants agricoles organiques (engrais, semences, plants, etc.) a organisé une visite m’emmenant alors à la découverte des sites de production et de commercialisation. Cela m’a donné l’occasion de me rendre compte de nombreuses réalités liées notamment à l’espace disponible sur le site, à la conservation et au conditionnement des produits .
En dehors de ces visites de terrain qui illustrent concrètement l’action de nos partenaires auprès de leurs membres et des communautés rurales, et permettent d’améliorer notre compréhension des besoins à la base, le responsable des partenariats participe aussi à des réunions plus formelles. Réunissant plusieurs représentants des organisations, il s’agit d’évoquer et d’échanger autour de l’actualité et des évolutions du partenaire, d’approfondir certains sujets particuliers en fonction de ses enjeux stratégiques.
[1]Le battage est l’étape consistant à séparer les grains de riz des épis. Le vannage est une opération qui consiste à trier les grains et les séparer des corps étrangers.
Le lundi 7 novembre 2022, Naturata a remis un nouveau chèque de 15 000 € à SOS Faim.
Thomas Backes, Co-Directeur de Naturataet Aender Schanck, Fondateur du Groupe Oikopolis, remettent le chèque de 15.000€ à Raymond Weber, Président de SOS Faim, et Christine Putz, Chargée de la récolte de fonds au sein de l’ONG.
En 2017, le principal réseau de magasins biologiques du Luxembourg s’est engagé dans un partenariat avec SOS Faim pour une durée de cinq ans.
Ainsi, au moment des fêtes de fin d’année de ces cinq dernières années, Naturata a fait appel à la générosité de sa clientèle. Les client(e)s avaient la possibilité de faire don de leurs timbres d’achat ou de faire un don en espèces. La somme recueillie fut ensuite complétée par Naturata jusqu’au montant final de 15 000 €, et ce chaque année.
Ainsi, depuis le début du partenariat, Naturata a octroyé un total de 75.000€ à SOS Faim.
Comme les années précédentes, la somme récoltée lors de fêtes de fin d’année de 2021 est utilisée pour soutenir un des partenaires historiques de SOS Faim : Amis du Kivu, une ONG congolaise engagée dans la lutte contre la pauvreté en milieu rural. L’ONG est basé au Sud Kivu, en République démocratique du Congo. Elle favorise la redynamisation des l’agriculture familiale et de l’élevage avec pour objectif la souveraineté alimentaire des populations rurales de la région. Concrètement, Amis du Kivu s’engage aux côtés des paysans et des communautés rurales en leur garantissant un accès plus équitable à la terre et en promouvant une agriculture de proximité de qualité.
À travers son engagement pour Amis du Kivu, Naturata met en œuvre sa devise « Fair a kooperativ mat de Bio-Baueren » au-delà des frontières nationales. Nous sommes heureux d’avoir trouvé en Naturata un partenaire qui partage les mêmes valeurs et la même vision de l’agriculture : économiquement viable, socialement responsable et respectueuse de l’environnement.
SOS Faim remercie la direction, le personnel et les nombreux clients de Naturata pour leur générosité ces cinq dernières années.
En ce dernier trimestre de l’année 2022, SOS Faim annonce
la concrétisation d’un nouveau partenariat avec l’association ALFANG, au
Sénégal.
L’Alliance pour la Formation d’Agriculture de Nouvelle Génération (ALFANG) est une association qui a vu le jour en 2015. Elle œuvre en faveur du développement économique local en offrant une formation adaptée à des jeunes sans emploi et/ou sans qualification et qui souhaitent exercer une activité professionnelle dans le domaine de l’agriculture, l’élevage ou de toute activité en lien avec ces secteurs en milieu rural.
Aujourd’hui, l’association a pour ambition de développer les infrastructures pour les formations et l’écotourisme. Mais aussi de développer la qualité de l’offre de formation et de trouver un modèle économique viable tout en préservant la vision et la mission de l’association.
3ième partie de la série
« Nous
avons tous droit à… », sur la Déclaration
des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes
travaillant dans les zones rurales : focus
sur l’article 19 de la Déclaration, qui
spécifie le droit aux semences pour les paysans.
Le droit aux semences tient une place centrale dans la Déclaration des droits des paysans. Avec le droit à la terre, il serait, si appliqué comme il se devrait, l’un des plus transformateurs ! La privatisation des semences au profit de grandes entreprises industrielles et commerciales a en effet dépossédé les paysans d’un travail intrinsèquement lié à leur raison d’être, et, en plus a engendré un appauvrissement de la diversité cultivée, donc des écosystèmes, et de notre alimentation.
Nous avons tous DROIT AUX SEMENCES
Premier maillon de l’activité
agricole, les semences représentent un enjeu crucial pour les producteurs. Les
semences paysannes permettent de cultiver des variétés adaptées à chaque
terroir, à même de satisfaire les besoins et habitudes alimentaires des
populations et capables de résister aux évolutions et aléas climatiques. Elles
offrent une diversité génétique à même de conserver, voire de restaurer la
biodiversité locale. De tous temps, elles ont été reproduites par les
agriculteurs et échangées entre eux. La qualité, l’accessibilité et la
diversité de ces semences leur confèrent un rôle essentiel aux plans agricole
et alimentaire, mais aussi économique et environnemental.
Alors que ces
pratiques coutumières restent essentielles pour le respect du droit à l’alimentation, ainsi que la sécurité alimentaire mondiale et la biodiversité,
la promotion de systèmes de semences commerciaux pose de sérieux défis au
maintien des systèmes semenciers paysans. Au fil du temps, une énorme
complexité s’est tissée autour des semences, piégeant les
agriculteurs dans un dédale de décrets, lois, directives et conventions.
Alors que le recours aux semences paysannes, de variétés anciennes et de mélanges variétaux est un atout pour mieux s’adapter aux changements climatiques et aux conditions locales, la forte hétérogénéité de ces variétés (tailles, formes, besoins en intrants, et autres) les rend difficiles à cultiver à une échelle industrielle. C’est la raison pour laquelle les avancées génétiques vont au contraire dans le sens d’une uniformisation du vivant en vue de faciliter l’usage des nouveaux outils, comme cela a été le cas lors de la mécanisation agricole, en adaptant le vivant aux outils plutôt que les outils au vivant !
Pourquoi cette
logique d’uniformisation et de monopolisation des semences pose-t-elle problème ?
Pour les paysans, les semences ne sont pas exclusivement une ressource, mais font partie intégrante de leur culture et leurs pratiques de gestion des semences revêtent des expressions spirituelles et culturelles. Tant que les semences étaient produites et échangées localement, « les droits collectifs d’usage des semences communes (…) suffisaient pour réguler ces échanges » (Grain de Sel, Les Semences : intrant stratégique pour les agriculteurs, octobre 2010-mars 2011). Or, ceci n’a plus été possible lorsque les semences ont commencé à être produites en dehors de ces communautés. Ce système n’était plus adapté aux semences industrielles produites et commercialisées en grande quantité par des entreprises de plus en plus éloignées des fermes qui les utilisent.
Des législations ont alors été
adoptées pour empêcher la vente de semences de mauvaise qualité, celles qui ne
germent pas ou qui risquent de propager des maladies. Les lois relatives à la commercialisation constituent le type de
réglementation le plus ancien et le plus répandu affectant les semences.
Ces lois définissent des critères à remplir, afin que les semences puissent être
commercialisées sur le marché. Elles sont souvent justifiées comme étant un
moyen pour protéger les producteurs et les semenciers contre les contrefaçons
abusives, ainsi qu’un moyen d’encourager l’innovation avec la création de
nouvelles variétés. Ces instruments assurent au créateur de semences une
exclusivité de commercialisation sur sa semence et/ou un droit de percevoir des
« royalties » dans le cas ou d’autres personnes commercialisent ou se servent
de ses semences. Ces réglementations ont
été pensées pour le développement d’une filière industrielle et ont contribué à
mettre en place au fur et à mesure des législations qui finissent par empêcher
les paysans d’utiliser leurs propres semences.
On peut ainsi déplorer un accaparement du vivant par l’industrie qui en
est arrivé au point où des réglementations imposent qu’une semence ne soit commercialisée
que si elle appartient à une variété inscrite dans un catalogue officiel. Or, pour
y figurer, une variété doit remplir les critères dits « DHS »
(distinction, homogénéité, stabilité) : elle doit être différente de
celles déjà présentes dans le catalogue, les plantes d’une même variété doivent
présenter une très forte similitude, et les caractéristiques de cette variété
doivent être les mêmes d’une année sur l’autre. Les deux derniers critères
excluent de ce fait les semences paysannes car elles peuvent présenter une
certaine évolution génétique à chaque génération en fonction des sols, du
climat et des sélections pratiquées par les paysans.
Si les variétés de semences commerciales ont pu améliorer les
rendements à court terme, les variétés traditionnelles des paysans et les
savoirs associés sont les plus à même de s’adapter à des environnements
spécifiques et tout particulièrement au changement climatique. Par ailleurs,
les meilleures performances enregistrées par les semences commerciales dépendent
de l’utilisation d’intrants coûteux (engrais, pesticides, herbicides,
fongicides) dont le coût s’ajoute à celui des semences qu’il faut racheter
chaque année et dont le coût environnemental est rarement pris en compte.
L’introduction et la diffusion des semences industrielles augmentent ainsi la
dépendance des petits producteurs vis-à-vis de l’industrie et rend leur endettement
plus probable.
Quant à l’uniformisation des semences, elle contribue à appauvrir la
biodiversité : selon l’Organisation
des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 75% de la
biodiversité cultivée a été perdue entre 1900 et 2000 et deux tiers de la
production agricole proviennent aujourd’hui de seulement 9 espèces végétales
différentes. L’appauvrissement de la
diversité cultivée mène à un appauvrissement des écosystèmes de notre
alimentation, rendant extrêmement vulnérable l’approvisionnement alimentaire
mondial. Il s’agit donc également d’un enjeu environnemental, nutritionnel et
sanitaire. En effet, la perte de la biodiversité et la standardisation des
semences sont non seulement nuisibles pour l’environnement, mais également pour
la santé en raison de l’appauvrissement en apports nutritifs des aliments issus
de l’agriculture industrielle. De ce
fait, c’est notre droit à une alimentation saine et de qualité qui se trouve
mis à mal.
« Celui qui détient les
semences détient la vie ». Mais qui détient les semences ?
Dans le commerce, les jardiniers
amateurs se voient souvent proposer un énorme assortiment de semences de
différents fabricants. Mais cette diversité est trompeuse : nombre de ces
sélections, tout comme les semences agricoles, sont en fait la propriété de
quelques grandes entreprises du secteur de l’agro-industrie. En 2018, les
quatre plus grandes entreprises de l’agro-industrie du monde détenaient une
part de marché des semences de près de 70 pour cent !
Mais comment une série d’orientations scientifiques, politiques,
juridiques ont-elles pu conduire à la perte de biodiversité dans les
champs ? Au nom de quoi, au profit de qui ?
De manière schématique, l’Union Européenne
a surtout mobilisé deux outils juridiques : d’un côté un système de directives
compatibles avec la législation internationale de l’Union pour la protection
des obtentions végétales (UPOV) dont l’une régit le Catalogue européen des
semences et les autres la commercialisation du matériel reproducteur de diverses
catégories de plantes. De l’autre côté on trouve un système de législation sur
les brevets.
Alors que le marché
se mondialise et que la concentration industrielle consolide le monopole de
l’industrie alimentaire entre les mains d’un petit nombre de multinationales, ces réglementations des pays industrialisés
se répandent également de plus en plus vers les pays du Sud, par exemple à
travers les accords de commerce et d’investissement, qui servent souvent à
imposer des lois sur les semences là où elles n’existaient pas auparavant, ou à
rendre les lois existantes plus favorables aux sociétés transnationales.
La communauté des pays donateurs
est également directement complice de l’expansion de l’industrie semencière en
Afrique, via les plus grandes organisations philanthro-capitalistes ou encore les
bailleurs de fonds nationaux européens. Nombre de ces gouvernements sont en
effet activement impliqués dans la Nouvelle alliance du G8 pour la sécurité
alimentaire et la nutrition (NASAN) et soutiennent financièrement de nombreux
fonds qui investissent dans les nouvelles entreprises semencières africaines.
Cette alliance, lancée en 2012, développe des cadres de coopération qui prévoient
des révisions des politiques nationales en matière de semences et autres
intrants, afin d’encourager une plus grande participation du secteur privé à la
production, à la commercialisation et au commerce des semences et d’autres
intrants. Ces mesures limitent généralement le droit des paysans de multiplier,
d’utiliser, d’échanger et de vendre leurs propres semences. Ces engagements
nationaux sont renforcés par le partenariat transversal « Scaling Seeds
and Other Technologies », mis en œuvre par l’Alliance pour une révolution
verte en Afrique (AGRA), visant à augmenter « l’adoption de variétés de
semences améliorées, d’engrais et d’autres technologies ». Ce faisant, l’AGRA
met l’accent sur l’établissement de conditions favorables à l’investissement
privé dans l’agriculture, notamment à travers les réformes juridiques, politiques
et institutionnelles.
Toutes ces mesures menacent directement les pratiques paysannes traditionnelles
et la liberté des paysans de gérer leurs propres semences, ce qui a pour
conséquence de limiter davantage l’utilisation des variétés de semences
paysannes et traditionnelles. Cette
transformation des systèmes semenciers africains, traditionnellement gérés par
les paysans, vers des systèmes dominés par le secteur privé, aura un impact sur
les moyens de subsistance de dizaines de millions de personnes sur le
continent, car les impératifs commerciaux ne répondent pas aux conditions
socio-économiques ou climatiques existantes.
Quels apports de la Déclaration des Droits des Paysans et quel rôle pour les États ?
Toutes les normes et les politiques qui empêchent les paysans
d’utiliser et de faire circuler leurs semences sont à présent en contradiction
avec l’article 19 de la Déclaration, et tout ce qui concerne le travail des
semences par les paysans est maintenant un droit qui leur est reconnu. « Ce qui auparavant était une évidence, avant
d’être accaparé et interdit au profit de semencier·ères privé·es, redevient une
prérogative des paysan·nes. Ce droit permet de sortir de la logique d’appropriation
privée qui est aujourd’hui dominante » (Fiche de formation n.3 du
CETIM).
Le droit ainsi reconnu aux
paysans de choisir leurs semences est une immense avancée, puisque cela remet
en cause, à la fois la mainmise des grandes entreprises transnationales de l’agro-industrie
sur la paysannerie, mais aussi le principe des catalogues, de la
certification et des brevets.
La Déclaration des Droits des Paysans donne obligation aux États de
revoir toute la législation en matière des semences et de modifier leur
réglementation pour que les pratiques paysannes redeviennent légales : tous les
systèmes internationaux de propriété intellectuelle, de certification et autres,
ne peuvent plus s’imposer aux paysans au détriment de leurs besoins et de la biodiversité
! Les États devraient donc promouvoir
des politiques d’aide à la mise en place et à la pérennisation des systèmes
semenciers paysans qui étaient dominants avant l’avènement du commerce des
semences par de grandes entreprises privées.
Dans ce dispositif, les États ont un rôle fondamental pour
veiller à ce que les paysans « participent activement à la définition
des priorités et à la conduite de la recherche-développement, compte tenu de
leur expérience » (Article 19.7). D’autre part, les États
doivent veiller « à ce que les politiques concernant les semences, les
lois relatives à la protection des obtentions végétales et les autres lois
concernant la propriété intellectuelle, les systèmes de certification et les
lois sur la commercialisation des semences respectent et prennent en compte les
droits, les besoins et les réalités des paysans » (Article 19.8).
Pour pouvoir respecter le droit aux semences, les États doivent
donc immanquablement revoir toute la législation en la matière. Alors que le
modèle juridique dominant aujourd’hui favorise le commerce et la privatisation
des semences parce qu’il est unifié par des normes internationales ensuite
retranscrites dans les droits nationaux, ces lois doivent désormais être revues
et modifiées pour se conformer à l’article 19 de la Déclaration afin que les
pratiques paysannes redeviennent légales et qu’il soit mis fin à une logique
d’appropriation privée des semences. Tous
ces systèmes internationaux de propriété intellectuelle, de certification, et
autres, ne peuvent plus s’imposer aux paysans au détriment de leurs besoins et
de la biodiversité.
Les semences c’est capital, pas CAPITALISTE !
Pour mieux comprendre les enjeux sur les systèmes semenciers et leur appropriation par l’agro-industrie, SOS Faim organisera le vendredi 25 novembre à 18h une conférence gesticulée sur cette thématique. Dans sa conférence gesticulée Corentin Hecquet nous emmène dans l’histoire de l’appropriation des semences qui, au fur et à mesure verrouille le système semencier et exclut toutes les variétés qui ne correspondent pas à une norme. Loin de s’arrêter aux constats amers d’une perte de biodiversité. Corentin raconte également comment des personnes essaient de faire entendre une voix dissidente.
Cette conférence
gesticulée se base tant sur son travail scientifique en sociologie (thèse de
doctorat en science de l’environnement) que sur son expérience depuis plus de
10 ans dans le monde des semences. Sur scène, il nous transmet une perspective
politique qui questionne la domination de la vie et du vivant.
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