Les Nations Unies offrent une victoire historique aux paysans

Les Nations Unies offrent une victoire historique aux paysans

Après plus de 17 ans de mobilisation du mouvement paysan international La Via Campesina et de ses alliés, le Conseil des droits de l’Homme des Nations-Unies a adopté à une large majorité (33 votes pour, 11 abstentions, 3 votes contre) le texte de la Déclaration des droits des paysans et des autres personnes travaillant en milieu rural ce 28 septembre. 

Cette victoire du mouvement paysan mondial reflète toutefois un monde fracturé suivant une ligne Nord-Sud: en s’abstenant (cas de la Belgique, de l’Allemagne, de la Croatie, de l’Espagne, de la Slovaquie, de la Slovénie),  ou en votant contre (cas de l’Autriche, la Hongrie et le Royaume-Uni), les Etats européens, ainsi que le Japon ou la Corée, se sont démarqués d’un élan mondial visant à enrichir les normes existantes en matière de droits humains et à contre-balancer la montée en puissance des droits à la propriété intellectuelle notamment, qui ont porté un coup d’arrêt à l’utilisation des semences paysannes.

Concrètement, la Déclaration rassemble et explicite les droits des paysans, tels que les droits à la terre, aux semences, à l’eau, à la sécurité sociale, à la santé, au logement, à l’éducation, à un revenu décent, au développement, à la participation, à la justice, etc.

C’est en 2012 que le Conseil des droits de l’Homme a créé un groupe de travail chargé d’élaborer un projet de Déclaration en vue de défendre les droits humains de centaines de millions de paysans et de paysannes qui sont identifiées comme les victimes principales de la sous-alimentation et de la pauvreté et qui souffrent de nombreuses discriminations et violations de leurs droits, dans les pays du Sud mais aussi dans ceux du Nord.

« En protégeant les droits de celles et ceux qui produisent notre nourriture tout en préservant les ressources naturelles, la Déclaration participe aux réponses à apporter aux grandes crises actuelles : pauvreté rurale et insécurité alimentaire, changements climatiques, dégradation des ressources naturelles et effondrement de la biodiversité, etc », explique Florence Kroff, de l’ONG FIAN.

Une position à contre-courant

Un positionnement d’autant moins compréhensible que le Conseil Economique et Social Européen, ainsi que le Parlement Européen, ont, courant 2018, appelé explicitement les Etats membres à voter pour les droits des paysans à l’ONU.

Le Luxembourg qui n’est pas membre du Conseil des Droits de l’homme mais qui aspire à la devenir en 2022, n’a, en ce début octobre, toujours pas apporté de réponse aux demandes réitérées de 12 organisations de la société civile* qui, avec SOS Faim, ont exposé au Ministre Jean Asselborn l’importance de soutenir cette initiative.

Ces organisations ne relâcheront pas leur vigilance : suite au vote du Conseil des droits de l’homme, cette Déclaration sera soumise en décembre à New York au vote de l’Assemblée générale des Nations-Unies. Celui-ci donnera une vision claire des pays du Nord qui auront su se positionner en faveur d’un texte auquel la grande majorité des pays du Sud apportent leur voix, car cette Déclaration instituera un outil juridique devant servir de levier à un rééquilibrage des inégalités Nord-Sud.

Marine Lefebvre

www.sosfaim.lu

*Autres associations signataires :

  • Action Solidarité Tiers Monde
  • Aide à l’Enfance de l’Inde et du Népal
  • ATTAC
  • Cercle des ONG
  • Etika
  • Fairtrade Letzebuerg
  • Fondation Caritas
  • Fondation Partage
  • Frères des Hommes
  • Meng Landwirtschaft
  • SEED
  • Vereenegung fir Bio-Landwirtschaft Lëtzebuerg

 

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